Les machines parlantes (« agents conversationnels » en bon français, « chat- bots » en anglais ordinaire) nous sont devenues familières : elles influencent désormais nos comportements et participent à l’avènement de ce qu’on pourrait appeler une informatique « affective », voire « humanoïde ». Mais que devient la parole lorsqu’elle cesse d’être humaine ? Lorsque des intelligences artificielles ne comprenant rien au sens des mots donnent de la voix et, comme enivrées d’elles-mêmes, disent«je»? Et, réciproquement, lorsque des humains usent d’« éléments de langage » si prévisibles et si formatés qu’on se demande si ce n’est pas leur propre parole qui, par quelque effet de contagion, a été comme robotisée ?
« La parole a perdu la parole », écrivait le philosophe Emmanuel Levinas. Que devrions-nous faire pour qu’il n’ait pas eu tout à fait raison ?